21h non stop
polo la soupape
2008 - Juillet 1999, si je me souviens bien. La Suisse, temps sec et frais, soleil ... Je me trouve à terminer un poisson du lac dans un p'tit resto à Spiez (CH) en compagnie du célèbre Marc Poels, Nos vacances valaisannes sont terminées ; lui rentre plein nord et moi je dois être ce soir du côté de Toulon. Activant mon unique neurone, je tire la Michelin de la sacoche (pas de GPS svp) et, estimant à vue de pif la distance jusqu'à Toulon, je me dis : "fastoche, Toulon, cela n'a pas l'air bien loin, 20cm en ligne droite sur la carte, comptons une grosse après-midi rapide pour faire cette route...
Ducatiste jusqu'au bout des chaussettes, j'étais parti pour ce trip en Suisse avec une MHR de '81, 65.000km au compteur et un moulin distillant des dB dans 2 Contis rutilants. Sachant que primo :les petites routes ne permettent pas vraiment des moyennes élevées et deuzio :je suis du genre sociable, vous vous doutez bien que ma famille qui comptait sur moi pour le BBQ de soirée ne m'a pas vu avant l'aube !
Le repas de midi, le soleil, les p'tits zoziaux, les Ducatis croisées ci et là (je m'arrête, moi Môssieur) ont, comme qui dirait, un poil retardé ces retrouvailles. A Spiez, à Gstaad : j'ai croisé 1 F1 et 2 Mike Hailwood. "Salut comment çà va". "Sehr güt und mit Ihnen ...", "Tiens, un Böfferding !". Tout çà nous rapproche pas vraiment du but. Bon, coup de kick, et volle gaz vers Martigny.
Ya pas à dire, ces Helvètes savent construire des routes. Propreté, balisage, paysage, ... Le top du top. Arrêt pipi. Je re-tire ma Michelin, façon l'extra-terrestre-à-la-Gotlib et re-trace une ligne droite mentale jusqu'à la côte. Ouais, bon, par là çà doit être chouette. Au menu : Chamonix, Megève, Albertville.
Col de la Madeleine, c'est beau, c'est mieux que la Tarentaise mais çà virole et je commence à fatiguer. Parti à 8h du mat' pour se faire Fürka, Grimsel et Süstenpass, il est déjà 18h et je ne vois toujours pas la queue d'une sardine. Arrêt café. Je me rend compte que mon timing est aussi naze que ma pomme.
Tant pis, foutu pour foutu, direction Saint Jean de Maurienne et le Galibier. Formidable route, mais pénible arrivée à 8h du soir. Je ne sais pas si vous connaissez le rayon de braquage d'une MHR mais ce n'est pas une tout-terrain. Après quelques photos et une petite bavette avec le club de vélo local, je profite pleinement d'une descente rapide. Le Lautaret permet de faire grimper la moyenne.
21h, mes épaules ne suivent plus et j'ai une crampe dans le poignet gauche - pas d'embrayage hydraulique ni de gaine en téflon - qui me force à faire halte dans une pizzeria à la sortie de Briançon.
La patronne du resto m'a à la bonne et, par pure charité bien entendu, entreprend de me masser les épaules. Quel service, hein les gars ! Je me laisse faire d'autant qu'elle est vachement gironde la bougresse. Bon, ben, euh peu de temps après, c'est de nouveau de la 20/50 que je respire.
Il commence à faire nuit, mon H4 fonctionne bien, direction le Col de Vars. Arrivé à Guillestre,
un déluge d'eau inonde soudain la route. Les freins à disques sont inefficaces à moins de laisser le doigt sur la poignée. Bon, soyons p-o-s-i-t-i-f, je suis au sec, mon Araï désembue bien. Mes lunettes par contre ... J'arrive
en haut du col de Vars dans un tonnerre d'éclairs. Je n'avais jamais vu çà.
Toutes les 15 secondes : brooom, flash, brooom, flash .. je ne vois plus où je roule. Pour
qui connaît, la route n'est pas très large, et il n'y a pas d'accotements stabilisés.
Le trou noir à chaque éclair et ... il est 11h du soir. Je décide de m'arrêter
et m'abrite sur le côté, sous un bout de toit. Quelques instants après, une Citroën DS s'arrête : un collectionneur surpris aussi par le temps. Sympa, il propose de me précéder ce qui m'arrange bien car les feus arrières de la DS sont au dessus du toit et donc bien visibles.
Minuit pile ! La grand place de Barcelonnette est sous 2 cm d'eau, c'est comme un miroir.
Je tire mon casque et là, je crois halluciner : des dizaines de Harley
garées partout, les cafetards sont ouverts et la musique est à fond. Je suis accueilli
de façon sympa par ces gars qui me font goûter à 36 trucs plus ou moins
licites. Je continue donc à ... baigner. Mais faut repartir, 5 ou 6 cafés et un jambon-beurre
feront l'affaire. Bon, les p'tites routes c'est fini, il est 1h du mat', je salue
toutes les barbes, dis merci comme un grand et pique sur Sisteron via la grand route où je
rejoins le temps sec et l'autoroute.
Couché sur la sacoche, les genoux dans le menton, je tire 6.000 t/min et çà roule super. Voilà une pompe à essence où je peux m'allonger pour une sieste dans le gazon. Caramba ! Je suis réveillé 5 minutes après par les sprincklers d'arrosage automatique. Den dûvel on â nek ! Bon, puisque le ciel est contre moi, je repars. Aix, Toulon sont avalés en quelques instants. Montée vers Bormes et arrivée au petit matin. Il est 5h et mon oncle est sur son balcon, prêt à partir pour sulfater ses vignes. Il m'accueille un peu surpris ; je lui raconte en 2 mots puis me dirige comme un zombie vers un plumard bien (?) mérité. 21h non stop, je ne le referai plus. Pas une goute d'huile perdue, pas un fusible pêté, pas un boulon perdu ... Mais quelle moto et quelles routes !
Polo - larmes à l'oeil
Road book: Google Map